Le Pape pour tous

« Bernard IV, acceptes-tu les pédés, les travelos, la gestation pour autrui, la fornication à volonté, et renonces-tu à toutes les conneries que tu profères depuis des siècles ? Dis une parole et tu seras guéri. »

Il est toujours comique, à chaque nouveau pape, de voir Modernité et Progrès faire mine de s’intéresser, voire de se réjouir de l’arrivée du futur nominé.

Ils sont laïcs, voyez-vous, mais démocrates avant tout : et à ce titre ils sont tout à fait disposés à accueillir la contradiction à leurs côtés. Le fameux « je ne suis pas d'accord avec vous, mais je me battrai jusqu'au bout pour que vous puissiez vous exprimer »... Avec une certaine innocence, ils ne désespèrent pas, un jour, de trouver un Pape pour tous, qui soit rallié à leur cause et à leur vision des choses.

Ils sont disposés à tolérer tout nouveau pape, à certaines conditions toutefois : qu’il renonce à 99 % de sa foi. C'est ainsi de bon coeur qu'ils espèrent que le nouveau pape soit quelqu’un qui s’attèle : à mettre fin au célibat des prêtres, à épingler le pin’s du sida sur sa chasub’, à condamner et bousculer l’institution ecclésiastique, à autoriser les prêtres femmes et à les marier entre elles, pourquoi pas, et aussi à rouler une pelle à Mimie Mathy en prime time sur le plateau des Enfoirés… Et si, pour finir, il pouvait convenir une fois pour toutes que Dieu est de la connerie, ils commenceraient peut-être à pouvoir considérer que les bases pour un débat sont saines, et que l'on peut éventuellement écouter ce qu’il a à dire.

Forcément, lorsque le type arrive, quel qu’il soit, les enfants de chœur de la Modernité et du Progrès sont toujours un peu déçus...

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Bienvenue en IndigNation

Remember Stéphane Hessel... (Publié en janvier 2011)
Stéphane Aisselle
« 93 ans. La fin n’est plus bien loin. ». Dès le début d’Indignez-vous, il vous prend comme un regret… L’âge a manqué un brin d’avancement. Une ultime promotion qui se sera fait cruellement attendre, et ne nous aura donc pas épargné l’adoubement de Stéphane Hessel par le Spectacle, en tant que dernier super héros des droits de l’homme, promotion 48. Indignez-vous, une bienpensance testamentaire manifestement écrite à titre posthume... L’âge n’est pas une excuse au terrorisme intellectuel ! Que diable l’a-t-on sorti de sa maison de retraite dorée d’ancien dignitaire ?! Indignez-vous nous intime-t-il, telle une métaphore de son incontinence.
« Buvez ! Ceci est ma pisse !»
Hessel, c'est donc le héraut qui débarque à H - une sec avant destruction terminale du monde par la bête immonde, dont on sait aujourd’hui qu’elle peut porter blush et gloss. Le grand bluff dans cette passe d’arme ! Ne fallait-il pas déterrer le dernier des mohicans droitsdel’hommistes pour contrer la barbarie à visage féminin ? Cette bête immonde psychopathe dont on nous promet l’éternel retour du monde des assassins assassinés, tel un Jason de série B sous masque de hockey, tandis qu’avance une aliénation mentale sans précédent. Hessel est hanté par ses spectres ; les nazis ne sont définitivement pas morts, empêcheurs qu’ils sont d’accueillir festivement en rond… de chapeau ! A force de faire tourner les tables sur leur dos, ma foi, qui sait ?...

2012, l'odyssée terminale a un peu d'avance

Hessel, c’est l’arche de Noë de la pensée, Gandhi et Superman réunis. « Je suis convaincu que l’avenir appartient à la non-violence, à la conciliation des cultures différentes.» A coup sûr Indignez-vous est le pamphlet subversif de l’année, du siècle, de l’Histoire ! De la fin de l’Histoire, cet avenir dont on ne cesse de percevoir qu’il est désespérément dépourvu de tout futur… « Je me suis toujours situé du côté des dissidents », écrit-il. Que l’éternité est longue, surtout vers la fin, disait Kafka... Mais Hessel fait mouche, car à son invitation à l’insurrection pacifique, nous nous indignons avec Stéphane Hessel, ou plutôt contre Stéphane Hessel. Sitôt cette sénilité achevée, fruit d’un vieil homme qui s’est payé à moindre frais une immortelle épitaphe humaniste, nous l’avons offerte à l’hygiénisme crépitant d’un autodafé d’enfer. Devant l’éloge unanime, le salut rom(ain) synchronisé au vieux sage, au nouveau guide et gourou, en un authentique et assourdissant Heil Hessel ! nous nous insurgeons avec fatalisme. 500 000 exemplaires vendus, décidément, on ne pensait pas la France en si piètre Etat…

Numéro zéro
Tout d’abord, il convient de commencer par le début, la page numéro zéro de cet opuscule festivus fascistus.
« Indigène est une maison d’édition dédiée aux savoirs et aux arts des cultures non industrielles des Premières Nations – Aborigènes d’Australie, Indiens d’Amérique, Tibétains, Inuit, Maoris… - sans oublier les « Indigènes » de nos propres sociétés, ces pionniers, chez nous, qui entendent rompre avec les logiques mercantiles, protectionnistes, standardisées, tout en dégageant de nouveaux pôles d’autorité intellectuelle et de viabilité économique. »
Ainsi s’ouvre Indignez-vous, avec la présentation de cette maison qui édite « Ceux qui marchent contre le vent. » Nous commençons donc cette farce par un anachronisme juridique. Aborigènes, Indiens, Tibétains, pris à témoin et catapultés Premières Nations ? Que ne les expose-t-on sous vitrine dans un musée de la pensée politique, potentielle annexe du musée du quai Branly ?! On devine tout de suite que ces témoins, par leur dénominateur commun de supervictimes du Progrès, sont appelés à la barre pour éclairer le jugement du jury post-moderne sur la responsabilité de l’homme… blanc. « La pensée productiviste, portée par l’Occident », peut-on lire dans le corpus Christi Indignez-vous. Et non, n’oublions pas les « Indigènes de nos propres sociétés » que la maison d’édition propulse « pionniers », mais sans nous qualifier de quoi. D’une conquête ? D’une reconquête ? De la rétrocolonisation ? eux qu’on nous présente comme étant les seuls à « entendre rompre avec les logiques mercantiles, protectionnistes, standardisées », de l’homo oeconomicus. C’est tout Debord, qu’on entend crier de dedans ses quatre planches ! Cet incipit, on le croirait écrit de la main même de Die… Jacques Attali ! Ces Indigènes (notez la majuscule, car c’est une Nation qui se lève, tout droit sortie de la côte des non alignés), dont il nous promet l’importation en masse, ne sont-ils pas une chance pour la France ? Et en effet, car il est désormais déclaré qu’ils sont les nouveaux et uniques Prométhée autoritaires et jaloux, détenteurs du feu de l’innovation et de l’eau de vie filtrée de la viabilité, promulguée seule eau propre à la consommation par les nouveaux gardiens du Temple de la Bienpensance, dernière pensée autorisée avant terminus... Cette ligne éditoriale ne peut sonner à des oreilles qui lisent, que comme une déclaration de guerre. Autant dire qu’Indignez-vous, livre pacifique, commence fort mal, et avant même d’avoir débuté… Une page zéro, un matricule qui lui va comme un gant… de fer.

Le Père Noé de la pensée bien mise

Un auteur au dessus de tout soupçon
De la page zéro, passons directement à la posface de l’éditeur qui nous présente l’auguste auteur. D’origine allemande, Hessel est né « d’un père juif écrivain (…) et d’une mère peintre, mélomane ». La mélomanie serait donc devenue une religion ? Hessel a été naturalisé en 1937. De plus, mobilisé pendant la drôle de guerre, il s’exile en 1941 Outre Manche pour y rejoindre le Grand Charles. On lui confie même une mission de contre espionnage et le voilà parachuté en 1944 en France occupée. Il ne tardera pas à se faire arrêter par la Gestapo. Torturé, il sera déporté à Buchenwald et on vous passe détails et péripéties, vous les connaissez sûrement. Hessel additionne donc la figure d’un non juif de culture juive, celle de l’immigré naturalisé, et celles du résistant et du déporté. Quelle meilleure combinaison pour tuer dans l'œuf toute pensée critique de réplique ? Le réagissant sera forcément déclaré fasciste et pendu haut et court sur la Cène médiatique et pourquoi pas, dans ses cours judiciaires de récréaction. Tenez, ceci est le corps d'un faf : bouffez-le ! Tout ça fleure bon la manipulation. Stéphane Hessel serait-il la Liliane Bettencourt de la pensée ?...

Hessel nous est présenté comme le dernier survivant des rédacteurs de la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948.  « J’ai, avec d’autres, été amené à participer à la rédaction de cette déclaration. » Il y a de quoi tempérer l’assertion, alors qu’il occupait la fonction de secrétaire de la Commission des droits de l’homme. Mais le grand homme la joue humble ( en rendant à César !) : « Je ne saurais oublier, dans son élaboration, le rôle de René Cassin, commissaire national à la Justice et à l’Education du gouvernement de la France libre, à Londres en 1941, qui fut Prix Nobel de la paix en 1968. » Et c’est heureux, car il fut le principal rédacteur de cette déclaration, si bien qu’on la nomme souvent Déclaration René Cassin.

Avoir deux mains gauches, un handicap ?

Un livre qui ignore les ambidextres
Revenons à la postface : « Il va devoir sa consécration comme diplomate à « cette modification dans le gouvernement de la France, écrit-il encore, que constitue l’arrivée de François Mitterrand à l’Elysée », en 1981. » Stéphane Hessel est décidément intouchable, car sacré chevalier de la table ronde de gauche par son roi soleil. De plus, il ouvre son livre en se référant au Conseil national de la résistance qui comporte un numéro de renvoi vers la note suivante : « Créé clandestinement le 27 mai 1943, à Paris, par les représentants des huit grands mouvements de Résistance ; des deux grand syndicats d’avant-guerre : la CGT et la CFTC (confédération française des travailleurs chrétiens ; et des six principaux partis politiques de la Troisième République dont le PC et la SFIO (les socialistes). » Dans ce livre, nous sommes bien entre gens de bonne compagnie, et qu’importe si Charles de Gaulle, duquel se réclame également Hessel, n’a jamais fait partie d’aucun de ces mouvements. Cela dit, son admiration pour le grand homme s’accompagne très bien d’un léger coup de griffe : « Il fallait que l’Algérie devienne indépendante, c’était évident. » Et il en aura fallu du temps au Général pour se rendre à l’évidence… Passons sur l’appel d’Hessel à voter pour des Kohn Bendit ou des DSK, émis sur le plateau du Grand journal… La campagne présidentielle, tel le Vietcong, ne s’arrête même plus pour pisser… 

Faites des bizous pas la guerre

Cogito comme une gentille peluche, ergo sum
Les déclarations de bonnes intentions se tirent la bourre dans Indignez-vous. Elles pleuvent comme à Gravelotte !
« L’écart entre les plus pauvres et les plus riches n’a jamais été aussi important »,  « L’indifférence, la pire des attitudes », « dans ce monde, il y a des choses insupportables », « Il faut lui préférer (à la violence) l’espérance, l’espérance de la non-violence », « Il faut arriver à une négociation pour faire disparaître l’oppression », « Il ne faudrait pas ex-aspérer, il faudrait es-pérer », « Il ne faut pas laisser accumuler trop de haine », « Il est grand temps que le souci d’éthique, de justice, d’équilibre durable devienne prévalent. »
Oui, l’injustice, c’est mal. Les inégalités, c’est mal. Le réel, c’est très, très mal. Préférons-lui les contes de fée, les bonnes intentions qui pavent les grands boulevards en Enfer.
Hessel parle aux jeunes, et en un mot comme en sans, à l’avenir !  On est resté coi devant son intervention sur les antennes de Canal+, la chaîne spécialisée dans le fascisme consumériste pédophile. Comme il nous a rajeuni Denisot, le viel homme ! Hessel invite les jeunes à prendre le relais de l’indignation car le « motif de la résistance, c’est l’indignation ». Il précise :
« Je vous souhaite à tous, à chacun d’entre vous, d’avoir votre motif d’indignation. C’est précieux. Quand quelque chose vous indigne comme j’ai été indigné par le nazisme : alors on devient militant, fort et engagé. On rejoint ce courant de l’histoire et le grand courant de l’histoire doit se poursuivre grâce à chacun. Et ce courant va vers plus de justice, plus de liberté mais pas cette liberté incontrôlée du renard dans le poulailler. Ces droits, dont la déclaration universelle a rédigé le programme en 1948, sont universels. »
Encartez-vous (au PS) qu’y disait… Hessel nous enjoint de nous mobiliser contre le fascisme, dont l’étalon or restera à jamais le nazisme et qu’importe sa mise à jour light et qu’il avance désormais masqué de derrière un sourire humaniste Ultra bright, inhumain car figé, forcément cruel... On se demande s’il est bien utile de rebondir sur son hégélianisme de Bisounours.
« L’hégélianisme interprète la longue histoire de l’humanité comme ayant un sens : c’est la liberté de l’homme progressant étape par étape. (…) L’histoire des sociétés progresse, et au bout, l’homme ayant atteint sa liberté complète, nous avons l’Etat démocratique dans sa forme idéale. »
Sens de l’histoire qu’il contredit par ailleurs, dans un moment de lucidité, quelques pages plus tard :
« Nous sommes dans un univers de violence », « les risques les plus graves nous menacent. Ils peuvent mettre un terme à l’aventure humaine sur une planète qu’elle peut rendre inhabitable pour l’homme », « Les dix premières années du XXIème siècle ont été une période de recul. Ce recul, je l’explique en partie par la présidence américaine de Georges Bush, le 11 septembre ».
Tout est tellement simple, simpliste, simplet, à travers les yeux miros, aveuglés par tant de salons à dorure, de Stéphane Hessel, ce gentil diplomate du bien. Pourquoi le fascisme, s'interroge-t-il ? Les possédants, avec leur égoïsme, ont eu terriblement peur de la révolution bolchévique, nous répond-il. Certes, et le traité de Versailles n'a jamais mis à genoux l'Allemagne, ni exaspéré le nationalisme völkisch, avec le krach au cul de 1929 derrière... Et inutile non plus de s’interroger sur ce sens de l’Histoire qui nous amène par bétaillères volantes, en tongs et bermudas, sur des plages du tiers monde toutes conformes et ensoleillées, avec leurs cocktails parapluisés, et leurs dunes de béton enClubMédisées. Piteuse liberté de tourisme équitable. Une turista, une véritable chiasse en barre, sous vide, pour tout avenir radieux.
Citant Sartre, il nous rappelle également ce fabuleux progrès qu’est la solitude de l’homme post historique.
« Vous êtes responsables en tant qu’individus » C’était un message libertaire. La responsabilité de l’homme qui ne peut s’en remettre ni à un pouvoir ni à un dieu. »
Construction bien malheureuse de cette phrase toute en négation, censée scander la libération de la Liberté ! Et debout les morts, Hessel de déterrer les icônes pacifiques mondiales de la lutte pour les droits civiques :
« Le message d’un Mandela, d’un Martin Luther King trouve sa pertinence dans un monde qui a dépassé la confrontation des idéologies et le totalitarisme conquérant. C’est un message d’espoir dans la capacité des sociétés modernes à dépasser les conflits par une compréhension mutuelle et une patience vigilante. Pour y parvenir, il faut se fonder sur les droits, dont la violation, quel qu’en soit l’auteur, doit provoquer notre indignation. »
D’où peut-il bien tirer le dépassement de la confrontation des idéologies, quand une brève analyse de la situation nous promet le retour des guerres de religion (si tant est qu’elles aient cessé un jour) ? D’où tire-t-il le dépassement du totalitarisme conquérant, quand les Etats-Unis sont toujours en goguette en Irak et en Afghanistan, et aux quatre coins du globe, et que la Chine s'élève ? Quant à la question des droits, ma foi, vous savez tout de suite de quoi il en retourne quand il vous faut prendre avocat pour vous défendre. L’égalité était censée se résoudre juridiquement. Elle s’y est abominablement dissoute dans un acide d'hypocrisie.

Tout le monde a le droit de devenir un crétin

Le droit à l’école, le droit à la sécurité sociale
« L’idéal de l’école républicaine, trop au service d’une société de l’argent ». Et poum ! Nous voici en accord avec Stéphane Hessel, qui fustige, à sa décharge, l’argent roi. Cependant, le voilà déjà qui poursuit : « et ne développant plus assez l’esprit créatif et critique », sentence sonnant nouvelle pédagogie appliquée, dont on sait qu’elle a justement irrémédiablement atomisé l’école républicaine.
Référons-nous maintenant à une nouvelle note de renvoi, concernant le droit à la sécurité sociale inscrit à la Déclaration de 1948 : « L’accès à une complémentaire de qualité est désormais un privilège dû à la position dans l’emploi, que les plus fragiles renoncent à des soins faute d’assurances complémentaires ». Les éditeurs semblent ignorer les dispositifs de l’Aide médicale d’Etat, qui transforme certains de nos halls d’hôpitaux en véritables hôpitaux de campagne humanitaires sous tente, et la Couverture mutuelle universelle, dispositif qui ouvre sur des abus honteux, véritables escroqueries à la solidarité. L’assertion reste néanmoins vraie, et y compris pour le bas du panier de la classe moyenne…

United of drapeau tricolore

Le communautarisme pour tout horizon
Hessel y va également de son jet d’allumettes dans la flaque d’essence sur laquelle nous piétinons tous, nous rabâchant aux oreilles l’indépendance de l’Algérie (un passé instrumentalisé à des fins de division et de confrontation communautaire, qui attise la haine et détruit le ciment républicain) et consacrant une partie non négligeable de son pamphlet consensuel au conflit israélo-palestinien, perpétuant ainsi son importation critique sur notre territoire, et tout ça pourquoi, pour construire le citoyen de demain, celui de la Gouvernance mondiale, le fameux citoyen du monde, cet interventionniste solidaire aux vieux relents coloniaux, ce paternaliste bon enfant, chez lui nulle part et partout, toujours enclin à brandir son sauve-conduit, son supra et super droit d'ingérence estampillé à des fins humanitaires, partout où le mèneront ses pas, guidés par ses envies de découverte et d'aventure, l'air du temps.
« Il faut absolument lire le rapport Richard Goldstone de septembre 2009 sur Gaza, dans lequel ce juge sud-africain, juif, qui se dit sioniste, accuse l’armée israélienne d’avoir commis des « actes assimilables à des crimes de guerre et peut-être, dans certaines circonstances, à des crimes contre l’humanité » pendant son opération Plomb durci qui a duré trois semaines."
Et Hessel, lyrique, d’y aller de son portrait angélique, idyllique, des super victimes palestiniennes, dont nous sommes au passage à cent lieues de nier les souffrances :
« Plus encore que les destructions matérielles comme celle de l’hôpital du Croissant rouge par Plomb durci, c’est le comportement des Gazaouis, leur patriotisme, leur amour de la mer et des plages, leur constante préoccupation du bien être de leurs enfants, innombrables et rieurs, qui hantent notre mémoire. »
Que celui qui n’a pas la larme à l’œil me lance la première pierre de l’Intifada mondialisée par ce genre de discours manichéen.

Tir ami ?

Le terrorisme victimaire consacré
Bien sûr, la violence, c’est pas bien et c'est le vieux sage Stéphane Hessel qui nous l'dit ! Cela dit, elle se comprend parfois, y compris lorsqu’il s’agit d'expédier rockets sur des civils, et pourquoi pas, de se faire péter au milieu d'un bus, et nous ne parlons pas du RER parisien et du Tube londonien... Mais allons, nous savons bien qu’il n’ait pas de civil israélien. Inch Tsahal !
« On nous a confirmé qu’il y avait eu mille quatre cents morts – femmes, enfants, vieillards inclus dans le camp palestinien – au cours de cette opération Plomb durci menée par l’armée israélienne, contre seulement cinquante blessés côté israélien. »
« Seulement » ? Le saint homme semble regretter l’absence de morts israéliens, certainement pour mettre en lumière le déséquilibre, mais quelle triste phrase. Tandis qu’il omet de préciser la configuration du théâtre des opérations palestinien : une guerre menée au beau milieu des civils. Il ne s’agit pas d’excuser, mais d’expliquer, à l’instar de Stéphane Hessel, mais dans tous les sens, à moins de dénier une bonne fois pour toute à Israël le droit à une existence :
« Je sais, le Hamas qui avait gagné les dernières élections législatives n’a pas pu éviter que des rockets soient envoyées sur des villes israéliennes en réponse à la situation d’isolement et de blocus dans laquelle se trouvent les Gazaouis. Je pense bien évidemment que le terrorisme est inacceptable, mais il faut reconnaître que lorsque l’on est occupé (…) On peut expliquer ce geste par l’exaspération des Gazaouis. Dans la notion d’exaspération, il faut comprendre  la violence comme une regrettable conclusion de situations inacceptables pour ceux qui les subissent. L’exaspération est un déni de l’espoir. Elle est compréhensible, je dirais presque qu’elle est naturelle, mais pour autant elle n’est pas acceptable. Parce qu’elle ne permet pas d’obtenir les résultats que peut éventuellement produire l’espérance.»
Le meurtre, l’assassinat, d’origine résistante ou terroriste, sont donc à bannir, non parce qu’ils sont des actes inhumains, qui tuent (épargnons-nous l’usage du mot criminel, pour ne pas que le pied nous glisse dans le sang), mais parce qu’ils ne sont pas « efficaces ». Triste et barbare euphémisme… Et voilà le pompon, Pim et Pam !
« Se dire la violence n’est pas efficace, c’est bien plus important que de savoir si on doit condamner ou pas ceux qui s’y livrent. »
Une contradiction pour notre héros des droits de l'homme ? Peut-être pas, car là se dévoile peut-être bien la nature de l’indignation de Hessel : une indignation consécutive à une violation des droits universels, non suivie d’effets. C’est entendu, et nous voyons depuis longtemps en local, quel avenir cet angélisme criminel nous promet : l'impunité, l’enfer sur terre.

Paris under attack

Pour un lâcher de ballons insurrectionnel
Hessel nous appelle pour conclure à une « insurrection pacifique ». Nous passerons sur ses dernières contradictions concernant l’environnement et l’un des huit objectifs du millénaire tendant à réduire de moitié la pauvreté dans le monde d’ici 2015, qui en passera nécessairement par une production/consommation à l’impact écologique certain, même si l’on nous vend cette dernière rationalisée par la grâce des concepts de développement durable, de commerce équitable, de consommation juste, soi-disant purgée de toute espèce de résidu colonial. Nous nous interrogerons sur la nature d’un oxymore. Un oxymore est-il un paradoxe ? Un cul de sac ?  Nous nous focaliserons également sur cet appel à la jeunesse,
« Aux jeunes, je dis : regardez autour de vous, vous y trouverez les thèmes qui justifient votre indignation – le traitement fait aux immigrés, aux sans-papiers, aux Roms. », que nous combinerons à l’article 15 de la Déclaration des droits de l’homme de 1948, qui dispose que « Tout individu a droit à une nationalité. » (française ?) et à cet avertissement interdisant toute espèce de débat contradictoire : « Non, cette menace (barbarie fasciste) n’a pas totalement disparu. » Comment ne pas y voir un jugement définitif sur l’atavisme du racisme de l’homme blanc, sur fond de chantage au fascisme ?

Miss Tic, ghostwriter de Stéphane Hessel

Conclusion Miss Tic’s style
Hessel conclut ainsi, nous récupérant au passage in extremis :
« Aussi, appelons-nous toujours à une véritable insurrection pacifique contre les moyens de communication de masse qui ne proposent comme horizon pour notre jeunesse que la consommation de masse, le mépris des plus faibles et de la culture, l’amnésie généralisée et la compétition à outrance de tous contre tous. »
Pour nous reperdre aussitôt, à deux doigts du point final, dans un éclat de rire à se taillader les veines :
« A ceux et à celles qui feront le XXIème siècle, nous disons notre affection : CREER C’EST RESISTER. RESISTER, C’EST CREER. »

Bienvenue en indigNation

Hessel nous ordonne de nous indigner, quand le Spectacle n’a de cesse de nous aligner les scandales, sans que cela ne provoque plus que des tempêtes d'indignation dans un verre d'eau. Hessel prône la négociation, quand celle-ci n’est devenue qu’une machine à piéger la contestation, un simulacre. Alors que tout le monde festoyait pour en finir avec l’année 2010, la réforme du régime des retraites de droit commun était publiée au Journal officiel. Hessel nous commande de défendre les plus faibles, quand il en fait le tri ethnique, discrimine positivement, nous abandonnant au passage tels des chiens mal léchés sur une aire d’autoroute, coupables de tout. Allez ! Au rebus de l'humanité ! La moraline de Stéphane Hessel sent de dessous les bras. Indignez-vous n’aurait mérité pour toute critique qu'un silence gêné, respectueux de l'homme âgé, au coeur tendre et au passé de résistant passé, dépassé et repassé, un point de suspension : ... comme les ponctuations chevrotines vomies par le canon d'un fusil à pompe.
Tout le Spectacle au garde à vous, ça valait bien une canonnade. Nous souhaitons toutefois à Stéphane Hessel le prochain prix Nobel de la paix...
Indignez-vous ? Pfff. 
Révoltez-nous ! Pfff, même plus...
Enculez-vous  ! On pourrait prendre le risque d'y prendre du plaisir...

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Le son du jour qu'a roulé sa bosse

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Mon empire pour un cheval




Philippe Muray n’est plus là pour tenir la désespérante/désopilante chronique de la modernité en marche, mais nous pouvons nous inspirer de son effort et relever encore les attaques les plus dégueulasses contre le bon sens, les traditions et les modes de vie « rétrogrades ». Un bel exemple nous vient de Pologne, où des associations font, comme partout ailleurs, leur travail de flic. Là-bas, certains militants estiment que la foire de Skaryszew, datant pourtant du XVème siècle, doit cesser, tout simplement. Pourquoi ? parce qu’on y vend des chevaux. Ces militants prétendent qu’en plus de les vendre, les gens de la foire les maltraitent. C’est bien connu, avant de mettre en vente un animal, on le maltraite un bon coup, histoire d’y donner des couleurs. D’ailleurs, pour vendre son ordinateur portable sur Ebay, il est recommandé de l’assaisonner préalablement à coups de gourdin.


Baste ! Pour un esprit normal, il est toujours difficile de comprendre les motivations des gens qui estiment parler d’égal à égal avec une tradition de plusieurs siècles, c'est-à-dire avec tous ceux qui ont suivi cette tradition depuis. Avoir si peu de complexe, être aussi sûr de soi, reconnaissons-le, cela force le mépris. Pour cette affaire, il semble que les militants pro-dadas reprochent aux acheteurs d’en vouloir non pas aux chevaux, mais à leur viande. Horreur ! Des gens mangent du cheval ? C’est à peine croyable.

Le principe du militant, quel que soit son « combat » (mot déshonoré depuis longtemps, que je répugne beaucoup à employer), c’est de faire passer son point de vue avant celui des autres. Tous les discours, les pseudo-arguments, les déclarations humanistes ne changent rien à cette équation simple : j’ai raison, et je vais t’y plier. Le militant aspire au triomphe comme le virus à l’hécatombe. On ne discute plus, ou si on le fait, c’est qu’on n’a pas le pouvoir de s’en passer. Militant, c’est un peu le même mot que Enculé.
Mais il faut savoir être juste, le militant n’est pas seulement animé de cynisme, il est souvent aussi un simple imbécile. Il ne voit pas le mal, le faisant en toute candeur, en toute passion. Ainsi, celui qui souhaite abolir la consommation de viande de cheval, ou de celle du boeuf, n’est pas forcément assez intelligent pour comprendre que si on ne consommait plus leur viande, les chevaux ou les bovins n’existeraient plus. Si on n’exploitait plus la laine des moutons, tu veux me dire pourquoi on continuerait à les élever ? Eh bien ça, un militant « vegan » n’arrive pas à le comprendre. Il croit peut-être que les paysans se cassent le tronc et s’endettent juste pour que les vaches fassent joli dans le pré… Le militant-plein-d’amour-pour-les-bêtes a beau avoir l’histoire d’homo sapiens sous les yeux, il ne saisit pas que l’homme partout tolère les animaux qu’il juge utiles, et qu’il écarte les autres. Imagine-t-il, ce con, le futur rempli de vaches retournées à la vie sauvage, comme le chien des romans de Jack London ?

Prenons de la hauteur, comme dirait Yann Artus-Bertrand : puisque la production de la viande nécessite mille fois plus d’eau que la production de pommes de terre, la démographie mondiale interdit que l’on continue longtemps à manger de la viande. Les réserves d’eau et les terres n’y suffiraient pas. Admettons que le raisonnement soit vrai : si on renonçait à manger de la viande, que se passerait-t-il ? Les bêtes dites « à viande » disparaîtraient. Paradoxalement, c’est parce qu’on ne les consommerait plus qu’elles n’existeraient plus. En tant qu’espèce, le plus grand danger qui menace la vache, c’est donc de ne pas être mangée !
On ne connaît pas bien la psychologie de ces animaux, mais certains éthologues pensent qu’entre deux ruminements, ils ont une vision assez lucide de leur condition. Ils ont sans doute compris ce mécanisme qui les lie à l’homme. Espérons qu’un jour, l’une de ces vaches, plus prolixe que les autres, s’en aille l’expliquer aux militants-qui-aiment-les-bêtes.


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Blasphème en musique

Il est toujours cocasse de voir se débattre sur scène un groupe de rock plus ou moins métal ou sataniste dans le but de jouer au diable, ou d’être le plus offensant possible envers la religion (notons qu’il s’agit toujours de sa religion, le christianisme, jamais de celle des autres).

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Le fameux « Pas de Boogie-Woogie », par Eddy Mitchell

Ce dont ne se rendent pas compte les Marilyn Manson et consorts, outre la désuétude de leur combat, c’est que même de cette façon, même par l'attitude insultante et provocante, ils restent fidèles à une esthétique d’essence chrétienne. Les valeurs du rock (liberté, dégoût du fric et de la corruption du monde, esthétique de la violence tournée contre soi, jeunesse innocente, idéal de l’intégrité...) sont chrétiennes d’une certaine manière. Et le Poète eut raison de chanter : « Jésus-Christ est un hippie ».

Le rockeur rebelle, quel que soit le maquillage qu’il arbore, est toujours au fond l’enfant maudit de ses parents chrétiens ou de sa culture chrétienne : son reproche et son dégoût sont ceux d’un éloignement des choses essentielles, et le cri qu’il pousse est sa façon de chasser les marchands du temple et de prôner un retour aux sources.

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« En vérité je vous le dis : ch’uis fin bourré ! »

Il existe en revanche des territoires beaucoup plus impies lorsque l'on souhaite enfoncer un couteau dans le cœur de Dieu. C’est ce qu’un Marilyn Manson ne comprendra jamais : il peut mettre en branle tout l’attirail, les cris et les mises en scène qu’il veut, il ne représentera jamais sur la figure du Christ un plus gros crachat que le premier rappeur venu faisant l’éloge du fric, de la vulgarité, de la pornographie, et de la violence contre l'autre. Mieux que le rock à cornes, il y a le rap ou la variété internationale pour jouer à l'Antéchrist. Là on ne dénonce pas le monde de l’argent : on l’épouse et on le glorifie. Là on n’est pas violent envers soi-même mais envers l'extérieur. Là on n’a pas de moralité : on jouit sans entrave.

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Il jouait du Femen debout....

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Forcené de Nantes, l'espoir renaît

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CGB dimanche du 17-02-2013


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Les tatoués sont des pédés, grâce à François Damiens

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Traçabilité alimentaire : vers un second tsunami français ?

Alors que la France est encore secouée par l'émoi provoqué par la découverte de viande chevaline dans des produits cuisinés industriels, un groupe de touristes a soulevé un nouveau scandale alimentaire ce mardi 12 février 2013, alors qu'il visitait Paris. 

Le quartier (Saint Michel - Notre Dame) fait pourtant l'objet de contrôles d'hygiène permanents tant les commerces culinaires et les touristes qui les fréquentent sont nombreux. Mais cette batterie de mesures n'aura vraisemblablement pas suffi : ce mardi, un lot de plus de 125 kilos de viande irrégulière a été découvert dans un établissement aux alentours de Notre Dame de Paris !

Rapidement débarquées sur les lieux, les autorités de contrôle sanitaire ont immédiatement procédé à des tests sur l'échantillon saisi. A première vue, la chaîne du froid semblait avoir été respectée et chaque échantillon de viande présentait les informations nécessaires à leur traçabilité. Mais les résultats ADN ne se sont pas fait attendre : la viande, étiquetée d'origine "féministe & athée", est en réalité de la viande de connasse 100 % en provenance d'Urkraine !

Ne manquez pas notre dossier dans le prochain CGB Dimanche :


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Les gens qu'on aime : Jules Berry


Jules Berry était né le 9 février 1883, une date pas plus mauvaise qu’une autre pour venir au monde. Si la médecine avait fait de réels progrès, il aurait fêté ses 130 ans parmi nous il y a trois jours.


Anecdote vécue la semaine dernière : je suis dans un groupe de 8 personnes, dont l’âge moyen tourne autour de 45 ans. J’évoque Jules Berry (me demandez pas pourquoi) : personne n’avait même entendu parler de lui. Je m’étonne. J’explique vite fait qui fut Jules Berry. On me rétorque que pour connaître un type mort en 1951, il faudrait vraiment avoir de la culture ! Je laisse tomber. (je précise que dans ce groupe, TOUTES les personnes sont diplômées de l’enseignement supérieur).

Jules Berry est le fantôme de ces cancres. Il vient ici, sous ma modeste plume, les tirer non par les pieds, mais par les oreilles, pour les mener de force au ciné club du coin. Ah, misère, on me parle de « culture » quand je pensais amour ! Amour du cinéma d’avant-guerre, cinéma populaire comme on n’en fit jamais plus, avec ses personnages ridicules, ses cocus, ses vieilles ganaches, ses types à moustaches, ses petits gros engoncés, ses enfants en culottes courtes, ses jeunes femmes aux sourcils épilés ! Et surtout, avec ses comédiens inoubliables. Ah, la diction des acteurs d’avant le charabia ! Tous formés au théâtre, où on ne plaisantait pas avec le public…


Jules Berry n’a pas fait que des chefs d’œuvre, loin s’en faut. Mais, comme dirait Jésus Christ, quel mérite y aurait-il à n’aimer que les types sans défaut ? En revanche, il fait partie de ceux qui illuminent par leur charisme personnel, de pauvres films justement oubliés. Il bouge, il parle, et ça fonctionne : allez expliquer ça ! Jules Berry est l’image d’une certaine flamboyance drôle et inquiétante. Il a créé le personnage du type louche mais beau parleur, souriant mais faux, qui trompe les hommes et dont toutes les femmes se méfient d’instinct. Chez Jules Berry, c’est tout le corps qui parle, les mains surtout, dans la gestuelle d’un saltimbanque qui aurait commencé sa vie professionnelle comme pickpocket. Elles sont là, ces mains, vivantes comme celles d’un chef d’orchestre, décrivant des lignes incompréhensibles, légères et nerveuses, caressantes, glissées soudain dans la poche d’un veston, tenant une cigarette en gardant toute leur liberté. Elles soulignent la nervosité du personnage qui n'est jamais au repos, qui donne furtivement des coups d’œil à droite et à gauche, tournant la tête à chaque instant comme pour s’assurer que personne d’autre n’écoute. Jules Berry, c’est l’orateur fascinant qui cherche à hypnotiser son interlocuteur, entre charme et embrouille.

Il faut savoir que bien avant les expérimentateurs à la Cassavetes, l’improvisation tint un grand rôle dans les interprétations de Jules Berry. Il faisait « du Berry » même quand ce n’était pas prévu, jouant avec son texte, ce qui explique que d’un film à l’autre, on a l’impression d’avoir déjà vu certaines scènes !
Son physique, son œil, son pif, son sourire et son phrasé l’ont souvent conduit à tenir des rôles d’ordures. Il a même joué le diable en personne dans Les visiteurs du soir : pour une ordure, jouer le diable, c’est un peu comme être élu à la présidence de la République, pour un ambitieux. Je recommande aussi son rôle d’ignoble dans Le crime de monsieur Lange, de Jean Renoir, dont voici un court extrait.



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Victor Hugo clashe Jack Lang sur le CGB


Jack Lang, Mariage pour tous
Y’a pas longtemps, notre Parrain des familles, du Bien et de l’Amour par tous les trous, Jack Lang, était sur le plateau du Grand Journal pour défendre le mariage pour tous. A Sylviane Agacinski, philosophe et femme de Lionel Jospin, qui tentait de faire valoir son scepticisme sur la question par quelque raisonnement structuré, avec des arguments reposant sur l’histoire, la culture, le droit des enfants qui doit primer sur le droit à l’enfant, Jack Lang répondit par un argument irréfutable, comme qui dirait le cantique des cantiques de la pensée politique : « Nous Madame, nous nous battons pour l’Amour ! »

Intrigués par cette imprécation définitive, les membres du CGB ont décidé lors de leur dernière conférence de rédaction de faire tourner les tables comme au bon vieux temps de leurs débuts. On est donc allés troubler le repos immémorial de Victor Hugo, le Steven Spielberg de la littérature française, chef de file des romantiques au pays des french lovers, qui doit donc s’y connaître en amour... Interview d’outre-ligne.

Mais vou zète pas des oufs ?!
Bonjour Victor, excusez-nous de vous déranger, c’est pour savoir votre avis sur le mariage pour tous...
VH. Le mariage pour tous ? Je vais vous donner mon avis sur le mariage tout court né parmi les brumes impétueuses de mon siècle alors que je le parcourais d'un bout l'autre pour ériger dans le ciel quelque étoile lucéférienne et salvatrice, quelque Vénus de la pensée dans la nuit noire et menaçante ! Tenez, p. 283 de L’Homme qui rit, tout est là, si vous me pardonnez une auto-citation.

On vous pardonne volontiers d’avance Victor, on est parfaitement aguerris au procédé grâce à Bernard Henri-Lévi, la grenouille qui voulait faire Grotius ET Victor Hugo dans la vie… Faut dire que lui aussi est milliardaire et républicain, tout ça tout ça, vous connaissez un peu le binz…
VH. Je maîtrise 30 % de la langue française, ce qui est incommensurablement prodigieux vous en conviendrez, mais pardonnez ma confusion sur ce point, car je n’ai pas l’honneur de connaître ce personnage… A-t-il au moins connu l’exil comme étalon/témoin de son sacrifice de corps et d’âme ?

Euh non, nous n’avons pas cette chance. BHL pratique volontiers le voyage en guerre mais protégé par les pious-pious français. C’est à croire qu’y vit sur un porte-avions. Mais rassurez-vous Maître, on ne souhaiterait pas sa lecture à notre pire ennemi. Nous vous en prions, procédez…
VH. Bien. EUHeuhumeuhHUM.
« Etre des gens mariés, cela ne va pas à l'air du visage, cela fane les rubans qu'on porte, cela vieillit. L'épousaille, solution désolante de clarté. La livraison d'une femme par un notaire, quelle platitude ! La brutalité du mariage crée des situations définitives, supprime la volonté, tue le choix, a une syntaxe comme la grammaire, remplace l'inspiration par l'orthographe, fait de l'amour une dictée, met en déroute le mystérieux de la vie, inflige la transparence aux fonctions périodiques et fatales, ôte du nuage l'aspect en chemise de la femme, donne des droits diminuants pour qui les exerce comme pour qui les subit, dérange par un penchement de balance tout d'un côté le charmant équilibre du sexe robuste et du sexe puissant, de la force et de la beauté, et fait ici un maître et là une servante, tandis que, hors du mariage, il y a un esclave et une reine.
Prosaïser le lit jusqu'à le rendre décent, conçoit-on rien de plus grossier ? Qu'il n'y ait plus de mal du tout à s'aimer, est-ce assez bête ! »
Vous pensez bien que le mariage d’homme à homme, je m’en tamponne le coquillard… ça me laisse tout chose d’avoir risqué l’érosion sur pied, battu par les quatre vents sur ce rocher digne de Sainte-Hélène qu’est Jersey. Ô, si j’avais su ce qu'ils maniganceraient de la République, j'aurais fait quelque économie d'échappée belle sur les barricades révolutionnaires des bancs de l'Assemblée nationale, je serais resté peinard et aurais chaussé maroquins ministériels… Le Palais Bourbon ne devait finir qu'en bourbier...

Un mot sur Jack Lang, homme politique dont la vision se réduit à se battre pour l'amour ?
VH. Quand une pensée sent autant la rose, c'est qu'il s'agit de dissimuler les effluves de merde...

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Le visage de la "Fin du monde" !





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22 v’là XXI

XXI comme 21 siècles de retard
On a récemment assisté à une conférence des créateurs de la revue XXI, Laurent Beccaria (directeur de publication) et Patrick de Saint-Exupéry (rédacteur en chef). Venus à la rencontre de leurs lecteurs, « qui ne sont pas des bobos parisiens comme le prétend The Economist » (nous confirmons, nous n’y avons vu que des bourgeois des beaux quartiers), à l’occasion de leur 5ème anniversaire, et de la publication du numéro 21 de XXI, la conférence s’est rapidement cristallisée sur le manifeste pour un nouveau journalisme des autoproclamés hérauts de l’info du XXIème siècle.
Décryptage. Plasticage.



Recul et retour : l’info de XXI va de l’avant…
« La revue XXI, c’est la volonté de proposer un journalisme différent. Il y a une demande d’une autre information, d’une autre manière de traiter l’information. Nous avons tous besoin de recul par rapport à l’actualité, mais aussi de revenir sur certains événements. » Le seul recul qu’on connaît au CGB, c’est celui du calibre 12 qu’on utilise pour notre activité favorite : le ball trap médiatique, qu’on pratique depuis 7 ans. Au CGB, on n’a ni besoin de recul, ni besoin de revenir sur quelque info que ce soit. On a compris, tout compris. C’est pas compliqué, on est nés, on avait déjà tout capté. On n’a plus besoin de rien entendre. Donnez-nous juste notre lot de cibles pour le carton quotidien...


In Amenas : pas plus de 40 morts

« L’Algérie a eu les réponses les plus adaptées », François Hollande, à propos de la prise d'otage d'In Amenas. Les forces spéciales ont respecté les panneaux de signalisation : pas plus de 40 morts parmi les travailleurs. L'otage (l'usine à gaz) se porte bien.


Un manifeste qui fait des vagues dans un verre d’eau
« Il s’agissait pour nous de restituer ce que nous avons appris au cours de l’expérience XXI, d’expliquer ce qu’on pense du journalisme d’aujourd’hui, a continué Laurent Beccaria. Le métier est déboussolé. Il subit de plein fouet la crise économique, doublée d’une désaffection des lecteurs, dans un contexte de montée de la numérisation. Les gens sont perdus, il s’agit pour nous de donner des directions et des voies d’espoir. » Qualifier la trahison de perdition est un sérieux indice sur le niveau de crédibilité des XXIèmistes, tellement sûrs de la qualité de leur « communauté de pensée ».
Patrick de Saint-Exuspéry, qualifié de « taiseux » par son acolyte de prendre la parole : « Ce manifeste est un retour sur l’expérience XXI, revue trimestrielle qui constitue en soi une prise de distance avec le temps. Nous évitons l’écume pour travailler la vague. Notre rapport au temps est inconnu dans l’univers de la presse. XXI a en réalité mis le poing sur trois plaies à vif dans l’univers de la presse qui participe de sa paupérisation : le rapport à la publicité, le rapport au temps et donc aux nouvelles technologies, et l’entre-soi qui caractérise le milieu, ce noyau en représentation permanente. Il y a de moins en moins de lecteurs, la presse parle de plus en plus à une élite : la pyramide s’est inversée mais c’est une inversion logique. Notre Manifeste avait pour but d’interpeler, de susciter le débat. Nous avons été très surpris par la faiblesse des réactions, des arguments trahissant pour nous une certaine atonie. La presse malade dit quelque chose de la vie de la Cité… »
Course au buzz, marchandisation de la presse, élite installée à la tête d’une armée de précaires, c’est pas ce qu’on appelle un triple scoop au CGB. Faut dire, on est les spécialistes du défonçage d’enfonceurs de portes ouvertes. C’est comme ça, on a ça dans le sang, dans les tripes. On a la rage, on a la haine. Et croire qu’un Domenach, qu’un Macé-Scaron, qu’un Joffrin, ou qu’un BHL, c’est une élite qui parle à une élite ou Dieu sait qui, équivaut pour nous à se mettre hors-jeu. L’élite c’est nous les mecs, nous qui avons la fâcheuse tendance à avoir une courbe exponentielle de trains d’avance sur cette soi-disant élite, à nouveau confortée dans sa posture d’élite par Patoche et Lolo les deux pieds nickelés de XXI, piteux sauveteurs en flaque du journalisme, élite de l'élite délitée.
C’est comme ça. Pas autrement. Une sorte de fatalité. On entend haut et clair ce que personne n’évoque jamais quel que soit le sujet : la vérité. Et en se payant le luxe de même pas être parano. Le temps travaille toujours pour nous...
La presse dans sa quasi totalité est la propriété des grands patrons français, à l’instar des politiques éligibles au pouvoir. Patrick et Laurent, tous deux muets sur la cause, sont évidemment muets sur la conséquence : la presse, c’est de la propagande, un pédalo pédagogique pour l’avènement d’une pensée convenable, unique, indubitable, en un mot comme en sang : totalitaire… La presse ? Mais... Mais... Mais, c’est d’la merde Monsieur Preskovic.

Ingrid Betancourt icône médiatique

Florence Cassez immaculée par les médias

Deux Madones médiatiques : une kidnappée, une kidnappeuse...


Le pouvoir c’est po bien
Pat de Saint-Ex enchaîne : « On dit que la presse serait le 4ème pouvoir. C’est une illusion très forte. La presse n’est pas un pouvoir, c’est au mieux un contre pouvoir. Une ivresse s’est emparée de la presse. » La presse sert le pouvoir, et le pouvoir se sert du pouvoir de la presse. A priori, l’appellation d’origine contrôlée estampillée Tocqueville (ou d’autres hein) « 4ème pouvoir », s’inscrit normalement dans un cadre démocratique, c’est à dire une super structure juridique qui sépare l’exécutif, le législatif et le judiciaire ; on sent bien que Pat se méfie a priori (par posture mainstream ou crasse ignorance) du mot pouvoir. De la bonne compromission bien convenue, du reader bien digeste pour les rebelles des beaux quartiers aux estomacs délicats, les écorchés vifs des salons de thé, Pat ne tardant pas d’ailleurs à se crasher lamentablement sur le mur de la honte.
Interrogé sur la vérification approximative de leurs informations par les journalistes, il explique qu’une simple erreur formelle n’est pas à même de remettre en cause le fond d’un article : « Dans notre manifeste, nous nous sommes trompés sur les dates de la liberté de la presse et de la parution du J’accuse de Zola, mais ça ne remet absolument pas en cause le fond de notre manifeste… » Tu parles Pat ! Pourtant, c’est pas compliqué : comment accorder quelque crédit à un journaliste qui veut révolutionner le journalisme, incapable de vérifier la date de la liberté de la presse ? On parle même pas du J’accuse, mais on accuse ! On crie à l’incompétence ! Au piétinement de la rigueur journalistique ! De la moindre des choses ! Du plus important des dus aux lecteurs : le B.A.-ba ! Quand on pense que Pat et Lolo se vantaient d’avoir le temps de bosser en qualité… Si la rigueur n’est pas due par le journaliste à ses lecteurs, alors c’est que le journaliste le méprise royalement et alors plus la peine de s'étonner de rien. D’ailleurs, au CGB on ne s’étonne pas nous, on reste digne.
« La réalité du monde aujourd’hui est terrible. Le paquebot est en train de couler. Nous n’avons pas une presse à même d’animer la vie de la Cité. On va dans le mur et en souriant. » Le CulturalGangBang s’est justement construit sur des sourires... C'est pas la fin du monde mon Lolo, c'est le monde de la fin.
Au CGB, on est le ramassis des Hommes qui rient… Les balafrés. 



Frigide Barjot : la morale chrétienne en imageLes homos se marient, les hétéros se PACSent

La morale contre le progrès réaco petit bourgeois. L'enculerie pour tous, c'est maintenant !


Le romantisme en bandoulière
Gratuit, garanti sans pub pour l’éternité, le CGB est sceptique quand Patrick s’exclame que dans la vie « c’est le projet qui est important, pas le financement ! » emportant les bravos des bourgeois réclamant sacrifice des ultimes forces vives idéalistes de la société sur l'autel de leur sacro-saint divertissement ; ils veulent s’en repaître pour rêver encore au coin du feu du cauchemar, le cul bien calé dans le fauteuil club.
Et ça continue dans l’ineptie romantique : « Le journalisme est enferré dans un truc formidable : l’objectivité. C’est stupide, ça n’a aucun intérêt, la seule règle qui vaille, la seule règle fondamentale, c’est celle de l’honnêteté. Personne ne peut prétendre être objectif. Nous faisons des choix de narration, donc nous avons un regard d’auteur, c’est un choix subjectif, mais ça ne donne pas pour autant licence à inventer quoi que ce soit, à faire de la fiction. Nous sommes là pour raconter l’histoire des autres, nous sommes des passeurs. La littérature et le journalisme ont des histoires entremêlées. »
Penser à l’instar d’un Kierkegaard que l’objectivité n’existe pas est une facilité romantique, de ce romanesque de roman de gare. Le métier du journaliste à la base, c’est le terrain, l’enquête, le recueil de témoignages, de faits, le recoupement d’informations, des subjectivités. L’objectivité c’est le nexus, la jonction, l’intersection, la somme des subjectivités. D’ailleurs après l’intervention magnifique de bêtise de l’un de ces spectateurs venus en fan, fustigeant les silences de la presse et les silences sur les silences de la presse (…), la vision de leur lectorat par Pat et Lolo s’affine : s’il faut le biberonner, l’éclairer, en somme l’élever, c’est que le lecteur est un putain d’enfant. Et les journalistes, subséquemment, des putains de pédophiles mentaux. Une vision du métier hautement narcissique, d’élite, d’utilité publique hein ? « Au 1er numéro, on avait très peur : on avait fait un numéro sur la Russie quand l’Express sortait l’interview de Carla Bruni qui officialisait sa relation avec Nicolas Sarkozy... » Au CGB, on vous prend tous, mais alors tous en même temps.

Constitution du VIIème siècle
La Liberté guidant le peuple

XXI à l’ouest du wild wild web
« Pourquoi pas un manifeste sur la production d’une nouvelle information ? Il existe des bons blogs, et on peut préférer une analyse théâtrale d’une information plutôt qu’une analyse de journaliste ? » avons-nous tout à coup entendu dans le public, surpris par la pertinence d’une question lors de cette soirée en bourgeoisie moribonde consanguine. Réponse de Laurent Beccaria : « Les blogs sont un atout extraordinaire ! Il y a une émergence d’experts. Je pense notamment à Maître Eolas, vous connaissez ? »
Prouver sa connaissance de la blogosphère en se référant à Maître Hélas, c’est prouver sa méconnaissance du bouillonnement critique 2.0. Affirmons de plus que nous avons tout sauf besoin de l’émergence de nouveaux experts, ces salopes qui se gargarisent de la complexité du système, ces généreux vulgarisateurs du « voilà comment vous vous faites enculer. »

Arnaud Montebourg Che Guevara en toc
On a les Che Guevara qu'on mérite. Saluez l'immense progrès de l'égalité par la précarité. Mieux que la délocalisation de nos politiques, nationalisons leurs culs


A l’heure où XXI fustige avec 21 siècles de retard la versatilité de la presse et l’accélération de l’information, à l’heure où bon nombre de groupes de presse pleurent après Xavier Niel pour qu’il délivre la publicité de sa Freebox et fasse cesser cette épidémie de Terrae incognitae sur leurs plages de bouses, pleurant pour leur survie en invoquant la liberté de la presse, le CGB persiste et signe : vous pouvez tous crever la gueule ouverte.
XXI a fait le buzz avec son manifeste en carton, s’enorgueillissant de sa pertinence devant la « virulence des réactions », notamment du côté des médias numériques comme Rue 89 (vaste blague mais vecteur de propagande virulent), selon l’axiome : s’ils sont pas contents, c’est que nous avons raison. C’est un peu court pour nous. On veut du pic, du cap, de la péninsule !
Alors on n’a plus le choix de publier notre manifeste à nous, qui tient en une phrase : quand j’entends le mot information, je sors mon rayon azer.
Il est temps pour chacun d’ouvrir les yeux, de se prendre en main, d’assumer ses responsabilités. De déterrer le réel enseveli.

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Les gens qu'on aime : William Burroughs



William Burroughs aurait 99 ans aujourd’hui. Il était né le 5 février 1914, une date aussi bonne qu’une autre pour venir au monde.
Le 5 février 1914, bien sûr, personne ne savait qu’il deviendrait un des deux ou trois plus grands écrivains américains de son siècle. A St Louis du Missouri, tandis qu’il poussait ses premiers cris, on a dû se contenter de dire « oh, le joli bébé ». Des banalités, en somme.


Comme tous les personnages ayant fait naître une légende, William Burroughs est souvent aimé pour de mauvaises raisons. Il est aussi détesté pour de mauvaises raisons, mais c’est un cas plus fréquent. La première des mauvaises raisons de l’aimer, c’est de l’aimer sans l’avoir lu. Oui, des gens détestent des films qu’ils n’ont pas vus, des livres qu’ils n’ont pas lus, ils sont en désaccord avec des déclarations qu’on leur a vaguement rapportées, c’est assez courant. Avec les légendes, nous trouvons aussi le cas de gens qui aiment un auteur mais ne le lisent pas. Ainsi, on aime Jack Kerouac pour sa belle gueule, Hemingway pour sa barbe d’ivrogne, on adule Joyce pour les mugs Finnegans wake qu’on trouve à Dublin, on adore Proust pour les téléfilms sur La Recherche, Céline pour se fringues rapiécées, ses chiens, ses chats, sa femme et Bukowski parce qu’il s’est saoulé en direct à la télévision française. On aime Chet Baker pour les photos de Chet Baker. On aime le Che pour la barbe du Che !

Dans les mauvaises raisons d’aimer Burroughs, voici les plus fréquentes :
• il fonda le mouvement beat
• il fit l’apologie de la drogue
• il est cool
• il inspira les punks
• il lutta pour faire reconnaître l’homosexualité
• c’est le Buster Keaton de la littérature

Évidemment, rien de tout cela n’est vrai, c’est ce qui arrive quand on aime un écrivain sans le lire. La variante peut consister à avoir quand même lu les quarante premières pages du Festin nu, puis à imaginer avoir une idée précise de son œuvre.

On pourrait passer des heures sur le Festin nu ou sur la drogue selon Burroughs, mais ce n’est pas le sujet. Celui qui, lisant Burroughs, ne comprend pas que la drogue est la Marchandise absolue, celle qui met le consommateur dans un état de besoin impérieux, qui l’esclavagise, c'est-à-dire qui le rend le moins libre possible, qu’elle est la quintessence de l’asservissement consumériste, un produit-virus conçu pour remplacer le cerveau du camé et prendre le contrôle de son misérable corps pour le plus grand profit du fourgueur, enfin une marchandise proprement diabolique, celui-là est un définitif trou du cul.

Pourquoi on l’aime, Burroughs ? Pour sa puissance littéraire, qui est avant tout une puissance picaresque. Aventure, critique de l’ordre établi, satire puissante, naturalisme burlesque, inventivité formelle, liberté de ton et de structure. Peu d’écrivains sont aussi drôles que lui, et plus que drôles : comiques. C’est une des dimensions essentielles de Burroughs, systématiquement négligées par les arbitres critiques, personne ne sait au juste pourquoi. Peut-être ne faut-il pas vulgariser la haute teneur existentielle de l’œuvre burroughsienne, traitant de graves problèmes sociaux (drogue, sexe, esthétique de la marge), en laissant penser qu’il considérait la vie comme une comédie bouffonne ? Une certaine critique bien-pensante, de gauche, ivre de prises de conscience militantes, n’est certainement pas prête à rigoler des camés, des pédés, des clodos et des vieilles putes comme Burroughs le fit dans tous ses livres.
Burroughs lui-même revendiquait pourtant cette tradition qui va de Pétrone à Céline, en passant par Thomas Nashe, le Guzmàn de Alfarache ou Jacques le fataliste. Car on peut dénoncer la misère en en rigolant, on peut rire de ses malheurs (c’est même recommandé), on peut faire autre chose que se plaindre, ou du moins se plaindre platement, comme le premier écrivain engagé venu. Et surtout, on peut écrire sans prendre de gants.

Dans la tradition picaresque, le héros est toujours un pauvre type qui tente de sortir de sa condition, qui expérimente, bouscule, force les choses, un trublion qui met la société à l’épreuve, en révèle les aberrations et les hypocrisies, s’affranchit du bon goût et des convenances, pour finir généralement au même point qu’au début de ses aventures… Comme Céline, qui l’a beaucoup influencé, Burroughs a réussi à coller à cette tradition dans un contexte moderne, mieux : d’avant-garde. On trouverait d’ailleurs beaucoup de points communs dans leurs œuvres : expérimentalisme formel, non linéarité, utilisation de l’argot, cruauté comique, pornographie, implication personnelle, etc. On trouvera surtout la joie que donne le génie quand il permet qu’on le suive dans ses fulgurantes errances.


Bien sûr, il n’y a pas que du comique dans Burroughs ! Il y a aussi des obsessions malsaines, une paranoïa inquiétante, une pulsion de mort évidente et une indécence considérable. Il y a l’expérience de la drogue et son récit circonstancié. Il y a une capacité d’invention qui tient du grouillement. Il y a aussi une intéressante théorie du langage nourrie aux leçons des codex mayas, le langage comme pouvoir, langage viral implanté dans le cerveau, générations après générations, pour un contrôle absolu, discret et permanent, de la pensée… D'où un dantesque combat littéraire contre le langage, qui donne sa matière à toute l’œuvre.
Ce qu’on aime, dans Burroughs, c’est la profusion, le mouvement, le non-sens, les points de vue et de fuite, la poésie crade et l’analyse inquiète de la condition humaine. C'est l'énormité du rire et le détachement souverain.

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